Extraits du TV Magazine du 27 février 2004

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Muriel Robin et Jenifer « Osez être généreux ! »

 

Entre deux chansons au Zénith de Toulouse, Muriel Robin rejoint Jenifer en coulisses. Bras dessus, bras dessous, elles prennent la pause, sans discuter. Pendant que la marraine des Enfoirés plaisante des directives du photographe - « Pour ne pas avoir un sourire figé », justifie-t-elle - la toute jeune maman, resplendissante, tente de garder un minimum de sérieux. À elles seules, Muriel Robin et Jenifer incarnent deux générations d’Enfoirés. Mais c’est d’une seule et même voix qu’elles appellent à la générosité.

 

Pendant le concert, les Enfoirés chantent « Personne ne te remplacera » avec des portraits de Coluche en toile de fond. C’est un passage très émouvant…

Muriel Robin - C’est vrai que c’est dur de le voir comme ça sur l’écran…

Jenifer - Ça donne vraiment la chair de poule.

M.R. - On ne s’habitue pas à sa disparition, tout comme on ne s’habitue jamais à la chanson des Restos du cœur. Ça me fait toujours quelque chose quand je l’entends. Coluche, personne ne le remplacera… comme tout le monde, mais lui plus que les autres.
J. - J’éprouve un grand respect pour Coluche. Il a fait en sorte d’aider les plus démunis alors que personne n’y croyait. Avec les Enfoirés, on a l’impression d’apporter nous aussi un petit quelque chose.

 

Beaucoup d’artistes rêvent en vain de rejoindre les Enfoirés, et vous, Jenifer, on a l’impression que tout vous sourit. Vous restez la seule chanteuse issue de la Star Academy à participer aux concerts, et même votre maternité ne vous a pas éloignée longtemps du devant de la scène.

J. - C’était important pour moi de revenir très vite. Ne pas être sur scène m’a manqué. J’aime vraiment ça. J’avais le trac… en fait j’ai tout le temps le trac parce que j’ai envie de faire plaisir. Parce que je sais également que rien n’est jamais acquis, même si je suis encore là dans deux-trois ans. Être sur scène est ma plus grande récompense.

 

Comment va le petit Aaron ?

J. - Très bien, merci. Mon fils est mon plus grand bonheur, il passe avant tout.

 

Muriel, en quoi Jenifer est une bonne « Enfoirée » ?

M.R. - Elle en a la carrure humaine. Elle fait vraiment partie de notre famille. En plus, elle n’a que 21 ans, je pourrais presque être sa mère, c’est touchant.

J. - Petite, j’étais fan de Coluche et de Muriel Robin. J’adore son humour. Elle me fait beaucoup rire. On s’était déjà croisées l’année dernière et je suis ravie d’être encore là cette année avec les Enfoirés.

 

Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

J. - Ça veut dire être une artiste qui s’implique, se donne à fond pour la cause des Restos. C’est se rendre utile.

 

Ce n’est pas frustrant de voir les Enfoirés se mobiliser ainsi depuis quinze ans et de constater que cette année encore la pauvreté a progressé de 10 % ?
J. - Oui, ça donne la rage de voir ça. On se sent impuissant.

M.R. - C’est vrai, c’est navrant. Non pas de s’être mobilisés, mais de voir qu’autant de gens en ont encore besoin. L’année prochaine, les Restos fêteront leurs 20 ans et il y a encore plus de personnes dans le besoin qu’au départ. C’est terrible ! Souvent, avec les Enfoirés, on se dit « et si on arrêtait, et si on laissait les pouvoirs publics s’en occuper ». Mais la vente des places pour les concerts ainsi que les produits dérivés - CD et DVD - représentent 20 % des fonds des Restos. Les Enfoirés, ce sont des millions de repas servis.

 

Vous êtes allées à la rencontre des bénévoles ?

M.R. - Oui, je suis allée leur rendre visite cette année. Mais je n’ai pas besoin d’être avec les bénévoles pour discuter avec des personnes dans des situations précaires. Dans la rue, je leur parle, je leur demande comment ça va, qu’est-ce qui s’est passé. Une fois, je n’ai pas pu, j’ai dit à une femme qui dormait sur le trottoir dans un froid de canard de venir chez moi. Mais ce n’est pas une solution.

J. - Avant d’être connue, j’ai servi des repas en hiver. Je n’étais pas bénévole dans une association. On faisait ça avec des potes, le soir. Toute cette pauvreté ne devrait pas exister. Voilà pourquoi c’est tellement important d’aider.

M.R. - Ce qu’il faut surtout retenir, c’est qu’on n’a pas besoin de tout donner pour aider les gens. Une heure par semaine, une heure par jour, même si on a que ça à donner, il faut le faire. Il faut oser donner. Plein de gens me disent qu’ils n’ont pas le temps. C’est une grosse hypocrisie tout ça. Qui n’a pas une heure à offrir ? Ou simplement un sourire, un regard à offrir ? C’est important pour eux. Un regard droit dans les yeux, c’est la moindre des choses et ça, ça les bluffe ! (...)

 

Stéphanie Raïo